Joseph Haydn

Robert Schumann

Trio n°1 opus 63
en ré mineur

1847

Bien qu’il y ait une structure classique définie dans l’œuvre, y compris un plan en quatre mouvements et beaucoup de savoir-faire intelligent dans le scherzo, le trio est assez individualiste. Il a été dit que Schumann a été le premier à introduire le trio avec piano formellement établi avec un style fortement personnel.

Le mouvement d’ouverture massif est construit à partir d’un thème chromatique recherché, agité et non résolu alors qu’il se fraie un chemin à travers des imitations canoniques, des figurations grondantes et des feintes rythmiques. C’est une musique qui suit un récit long et subtil sans les cadences fortement articulées du style classique croustillant. Un passage turbulent d’accords à grands pas fait place à un second thème littéralement exaltant qui se déplace toujours avec des gestes indéfinis et ondulants, une autre étape dans l’envie de voyager sans fin du romantique. L’exposition s’achève sur le premier thème brièvement transformé en une tonalité majeure, un sentiment renouvelé que ce voyage de sondage pourrait finalement progresser. Schumann free mélange tous ces éléments dans le développement avec un tout nouveau thème qui apparaît d’abord comme une étrange apparition dans des couleurs douces et lointaines, se rapproche brièvement avec une plus grande majesté, mais est finalement englouti par la tristesse irrésolue et dominante.

Le scherzo est d’une simplicité trompeuse dans ses moyens musicaux, captivant par son effet. Les cordes se joignent à l’unisson pour jouer à un jeu de suivi du leader avec le piano montant et descendant des passages de gammes simples dans une imitation canonique. Un rythme pointé avec un tourbillon délirant intermittent maintient l’élan d’une musique qui est moins que monothématique, elle est essentiellement non thématique : un récit de vecteurs et de gestes. Le divertissement s’intensifie à travers des imitations en mouvement contraire et la délicieuse ironie que tandis que les cordes se rejoignent en une seule, le pianiste solitaire se sépare en deux, chaque main devenant une partie distincte et divergente. Étonnamment, le trio ne fait que continuer ce jeu minimaliste en offrant un contraste à travers un rythme doux plutôt que pointé et la division de l’unisson des cordes en fils musicaux séparés.

Le troisième mouvement lent est le centre de gravité défini. Intime, solitaire, vulnérable, une lamentation prolongée donne l’apparence d’une sonate pour violon. En entrant dans son registre supérieur, le violoncelle se joint doucement à une réponse douloureuse puis entrelaçant la conversation avec des lignes douces et longues, un aspect omniprésent de l’ensemble du trio. La musique prend de l’ampleur alors que le duo s’envole vers des perspectives plus brillantes qui, hélas, ne s’avèrent que fugaces. La complainte revient, s’assombrissant dans la tragédie, le chant funèbre et la dévastation. La musique se bloque, abattue sur une cadence non résolue.

Schumann résout ce statu quo lugubre avec un jeu brillant et fougueux de personnages colorés dans une marche audacieuse de courage, de triomphe et de textures orchestrales. Ce défilé aux multiples facettes est une spécialité de Schumann. Dans ce cas, il est particulièrement efficace pour créer un tout organique en utilisant de riches variations thématiques qui dérivent toutes du matériau initial. Malgré (ou précisément à cause de) l’angoisse d’antan, la musique se construit progressivement vers une fin glorieuse qui, comme d’autres conclusions de Schumann, peut vous propulser sur vos pieds avec un cri de gloire énergique. L’œuvre composite est une étude définitive de la bipolarité, peut-être un reflet personnel de l’âme de Schumann.

© Kai Christiansen Utilisé avec autorisation. Tous les droits sont réservés.

 

Illustration :
Thomas Couture (1815 - 1879), Les Romains de la décadence (1847), huile sur toile, 472 x 772 cm, Musée d'Orsay.