
Joseph Haydn
31 mars 1732 – 31 mai 1809
Oeuvres au répertoire
Biographie
Joseph Haydn, né à Rohrau sur la Leitha en Basse-Autriche, le et mort à Vienne le , est un compositeur autrichien. Il incarne le classicisme viennois au même titre que Mozart et Beethoven, les trois compositeurs étant regroupés par la postérité sous le vocable de « trinité classique viennoise ».
La carrière musicale de Joseph Haydn couvre toute la période classique, allant de la fin de la musique baroque aux débuts du romantisme. Il est à la fois le pont et le moteur qui a permis à cette évolution de s’accomplir. L’image du « papa Haydn » ne vient pas des titres de « père de la symphonie » ou « père du quatuor à cordes » généreusement décernés au xixe siècle et même de nos jours. La création de ces genres relève d’une genèse un peu plus complexe, mais Haydn a très largement contribué à leur émergence et leur consolidation.
Deux de ses frères furent également musiciens :
- Michael Haydn (1737-1806) également compositeur et collègue de Mozart à Salzbourg ;
- Johann Evangelist Haydn (en) (1743-1805), ténor que Joseph fit venir à Esterhaza en 1763.
À l’âge de six ans, il apprend les rudiments de la musique auprès de son cousin, Johann Mathias Franck, maître d’école et maître de chœur à Hainburg, en Basse-Autriche, qui s’était engagé à le former. Dès sept ans, remarqué grâce à sa belle voix de soprano, il devient choriste dans la maîtrise de la cathédrale Saint-Étienne de Vienne où il est éduqué musicalement par G. Reutter. Comme beaucoup d’autres à travers l’Europe, il fait donc partie des garçons qui chantent avec et dans le chœur professionnel d’une église. L’ensemble est placé sous la direction du Kapellmeister Georg Reutter le jeune, à la fois maître du chœur et maître de musique des enfants.
Joseph Haydn fut le premier, avant Mozart, à vouloir devenir musicien indépendant. En tant qu’interprète, il ne s’orienta pas vers la profession de musicien d’église et ne devint que plus tard maître de chapelle. Vers 1750-1752 (à l’âge de 18-20 ans), à Vienne, il mena d’abord une vie difficile. Livré à lui-même, il jouait occasionnellement du violon lors de sérénades, de bals et d’inhumations. Il donna aussi des leçons de piano à de jeunes élèves ainsi qu’à la comtesse de Thun. De même, il devint valet de chambre (qualification pouvant parfaitement signifier qu’il était employé comme musicien). Cette période n’est connue que par la narration qu’Haydn lui-même en fait à la fin de sa vie à ses premiers biographes,
En 1757, le baron Karl Joseph von Fürnberg (1720-1767) l’invite pendant quelques mois à participer aux séances de musique de chambre dans son château de Weinzierl, près de Melk, où Haydn compose ses premiers divertimenti ou cassations pour quatuors à cordes, qui établirent sa renommée, et sont à l’origine de la fortune de cette formation. L’année suivante, peut-être sur la recommandation de Fürnberg, il devient directeur de la musique chez le comte Karl Joseph von Morzin (1717-1783), qui est donc son premier employeur. Il compose alors ses premières symphonies pour un petit orchestre de seize musiciens.
À cette époque, il tombe amoureux d’une de ses élèves, Theresa Keller (1733-1819), fille d’un ami, et la demande en mariage. Mais Theresa étant destinée au couvent, Haydn accepte alors d’épouser sa sœur, de trois années plus âgée, Maria Anna Theresia Keller (1730-1800)11. Les premiers biographes de Haydn, Albert Christoph Dies et Georg August Griesinger sont en désaccord pour reconnaître la qualité d’aînée entre Theresa et Maria Anna. Marié le , le couple n’eut pas d’enfant.

En difficulté financière, le comte Morzin doit se résoudre à dissoudre son orchestre. Joseph Haydn retrouve rapidement une place auprès d’une des plus grandes et des plus fortunées familles de la noblesse hongroise : celle des princes Esterházy. Le contrat signé le reflète bien la situation sociale des musiciens sous l’Ancien régime. Outre les formules qui pourraient être jugées aujourd’hui humiliantes, Haydn s’engage vis-à-vis du prince à lui réserver la totale exclusivité de ses compositions. Toutefois, contrairement à ce qui était fréquent à l’époque, Haydn ne sera jamais traité comme un simple laquais et le prince, grand amateur de musique, rapidement conscient du génie de son employé, ne résistera pas à la demande extérieure des éditeurs et du public au sens large.
Il sert cette famille pendant plus de trente ans. D’abord au service de Paul II Anton Esterházy (1711-1762), la plus grande partie de son activité de compositeur se confond avec le règne de son frère Niklaus (Nicolas dit « le Magnifique »), prince mécène, féru de musique, qui laisse à Haydn toute capacité de développer librement son génie. Haydn est engagé comme vice-maître de chapelle de Gregor Joseph Werner auquel il est subordonné pour ce qui a trait à la musique de chœur. Il devient maître de chapelle à la mort de Werner en 1766.
Pour assurer ses fonctions de maître de chapelle, Haydn dispose d’une troupe de chanteurs et d’instrumentistes de grand talent. Il dirige ses propres œuvres, mais aussi celles de ses contemporains, adapte de nombreux opéras italiens, compose des pièces spécifiques pour un type particulier de viole de gambe, le baryton, qui est l’instrument favori du prince Nicolas.
Durant les années passées au service des Esterházy, il écrit plus de cent symphonies (expérimentant dans ce domaine comme personne ne l’avait fait avant lui), des quatuors à cordes, concertos, sonates et pièces diverses pour clavier, opéras, divertissements et œuvres de musique sacrée. Rayonnant à partir des palais de la famille Esterházy, la célébrité de Joseph Haydn ne cesse de croître dans toute l’Europe, jusqu’à faire de lui le musicien le plus fêté et admiré du continent. Dès 1770, le prince l’autorise à diriger ses propres œuvres à Vienne. Dans les années 1780, Haydn reçoit des commandes directes et propose ses compositions en édition à Vienne, Paris et Londres.
C’est le ténor Michael Kelly qui décrit dans ses mémoires la séance de quatuors réunissant quatre interprètes (tous connus comme compositeurs) : Wolfgang Amadeus Mozart tenant la partie d’alto et Haydn au premier violon, auxquels s’étaient joints le baron Karl Ditters von Dittersdorf au second pupitre de violon et le musicien tchèque Johann Baptist Vanhal au violoncelle. La rencontre (la première attestée entre Haydn et Mozart) eut lieu en 1784, mais il est possible qu’elle fut précédée d’autres.
Quoi qu’il en soit, les deux hommes, que vingt-quatre ans séparent, se lient d’amitié et cette rencontre sera suivie d’autres jusqu’au départ de Haydn pour Londres. On ne trouve pas d’équivalent dans le domaine de la musique de cette relation touchante faite de sentiments d’estime et d’admiration réciproques. Léopold Mozart, dans une lettre à sa fille Nannerl révèle les propos tenus par Haydn le à l’issue d’une séance de quatuor :
« Je vous le dis devant Dieu, en honnête homme, votre fils est le plus grand compositeur que je connaisse, en personne ou de nom, il a du goût, et en outre la plus grande science de la composition. »
De son côté, Mozart, en septembre 1785 dans la dédicace qu’il adresse à son aîné pour l’édition des six quatuors opus 10, reconnaît la part prise par Haydn dans ces nouvelles œuvres :
« À mon cher ami Haydn. Un père, ayant résolu d’envoyer ses fils dans le vaste monde, a estimé devoir les confier à la protection et à la direction d’un homme alors très célèbre, et qui, par une heureuse fortune, était de plus son meilleur ami. Ainsi donc, homme célèbre, et ami très cher, je te présente mes six fils …/… Toi-même, ami très cher, lors de ton dernier séjour dans cette capitale, tu m’as exprimé ta satisfaction. Ce suffrage de ta part est ce qui m’anima le plus. C’est pourquoi je te les recommande, en espérant qu’ils ne te sembleront pas indignes de ta faveur. Veuille donc les accueillir avec bienveillance, et être leur père, leur guide et leur ami. De ce moment je te cède mes droits sur eux, et te supplie de considérer avec indulgence les défauts que l’œil partial de leur père peut m’avoir cachés, et de conserver malgré eux, ta généreuse amitié à celui qui t’apprécie tant, car je suis de tout cœur, ami très cher, ton très sincère ami. »
À l’imitation de Mozart, Haydn adhère en à une loge maçonnique, ce qui à l’époque est compatible avec la foi catholique du compositeur15. Mais contrairement à son jeune ami, cette adhésion ne semble pas avoir eu d’influence sur ses œuvres futures.
Mozart meurt pendant le premier séjour de Haydn à Londres. Ce dernier en est profondément affligé et écrit à Johann Michael Puchberg, un ami de Mozart16 :
« J’ai été longtemps hors de moi à la nouvelle de la mort de Mozart, et je ne pouvais croire que la Providence ait si vite rappelé dans l’autre monde un homme aussi irremplaçable. »
Haydn participe dans la salle de Hanover Square à douze concerts par souscription du au au cours desquels il crée quatre nouvelles symphonies (90e, 92e, 95e et 96e). En juillet, il se voit décerner par l’université d’Oxford le titre de docteur honoris causa2. L’année suivante, le Professional Concert, concurrent de Salomon, après avoir essayé de débaucher Haydn, fait appel à son ancien élève Ignace Pleyel pour essayer de jouer de la rivalité entre les deux compositeurs. Les douze concerts prévus sont programmés dans la même salle du au .
De retour à Vienne en , Haydn prend comme élève Beethoven alors âgé de 22 ans. Ultérieurement les relations des deux hommes se dégradèrent au point que les leçons de contrepoint délivrées par Haydn furent dénigrées par Beethoven lui-même et certains auteurs. Il n’en reste pas moins que Beethoven bénéficia des conseils éclairés du modèle musical que représentait Haydn à cette époque. En , Haydn part pour une deuxième tournée à Londres laissant son jeune élève entre les mains d’Albrechtsberger. Au cours de ces deux années, Haydn crée de nombreuses œuvres originales et notamment les six dernières symphonies londoniennes. Lorsque Haydn quitte définitivement l’Angleterre en , il est considéré comme « le plus grand compositeur vivant ».
Très affecté par le décès de ses frères Johann en 1805 et Michael en 1806, Joseph Haydn ne compose plus. Fatigué et malade, il laisse inachevé son dernier quatuor opus 103. Sa dernière apparition à un concert public a lieu le pour une dernière audition de La Création sous la direction d’Antonio Salieri. Les dernières années, de nombreux compositeurs et musiciens font le pèlerinage jusqu’au domicile de Haydn, émus ou simplement curieux de rendre une dernière visite au vieux maître. Il décède le pendant l’occupation de Vienne par les troupes napoléoniennes. Napoléon envoie cependant un détachement pour lui rendre hommage lors de son enterrement. Deux semaines après son décès, le , un service funèbre lui fut rendu dans la Schottenkirche, où fut joué le Requiem de Mozart.